La Présidence française de l’Union européenne ne sera pas une présidence ordinaire. J’en ai la conviction.
D’abord parce que Nicolas Sarkozy a décidé de mettre au cœur de cette présidence ce qui constitue aux yeux des 450 millions de citoyens de l’Union européenne une priorité absolue : l’immigration, l’énergie et l’environnement, la sécurité et la défense.
Ensuite, parce qu’elle va être marquée par une initiative historique : le sommet de l’Union pour la Méditerranée. 43 chefs d’Etat sont invités autour de la même table pour travailler ensemble sur des projets de développement ; pour considérer de nouveau la Méditerranée comme un creuset, comme un pont, comme un carrefour. Nous pouvons être fiers de cette initiative de paix qui doit réunir ceux qui, depuis longtemps, ne se parlent plus ou, pire, se combattent. Elle correspond pleinement à la vocation de notre pays et elle ouvre des horizons nouveaux pour « notre mer » et pour toute l’Europe !
La Présidence française va faire grandir l’Europe des projets, une Europe qui prend à bras le corps les problèmes des citoyens pour leur apporter des solutions concrètes, une Europe qui les écoute et se met à 27 pour agir efficacement. C’est la meilleure façon de reprendre l’initiative après la victoire du non irlandais au Traité de Lisbonne.
Ce non irlandais en 2008, tout comme le non français et le non hollandais en 2005, nous commande une bonne fois pour toutes d’ouvrir les yeux : combien de référendums faudra-t-il encore perdre avant de mettre les citoyens au centre de la construction européenne ?
Nous sommes à un tournant : la construction de l’Europe par des visionnaires puis par des experts particulièrement impliqués, cela a sans doute été nécessaire au début. Cela a pu marcher pendant des années. Cela n’est plus possible à présent… Au 21ème siècle, on ne fait pas le bonheur des peuples malgré eux. Si nous voulons aller plus loin dans cette formidable aventure européenne, nous devons embarquer tous les citoyens d’Europe avec nous !
Pour refonder la relation entre l’Europe et les citoyens, les députés nationaux des 27 pays européens ont une responsabilité majeure à assumer. Jusqu’à présent, nous étions un peu tenus à l’écart et les avancées de l’Union se traduisaient par un affaiblissement des parlements nationaux. Une part croissante du travail parlementaire consiste depuis des années à transposer des directives européennes, sans trop de marge de manœuvre.
Ces « transferts de compétences » sont une avancée lorsqu’ils sont consentis par les Français, qu’ils respectent la subsidiarité et qu’ils permettent une action politique plus efficace. Mais il y a un vrai problème quand la prise de décision au niveau européen écarte de fait le citoyen et ses représentants élus ; quand le débat démocratique n’a plus lieu à Paris sous prétexte que les décisions sont prises à Bruxelles.
Faut-il que j’égrène la liste noire de toutes ces directives dont le nom reste lié à des polémiques parce que les citoyens français et leurs parlementaires ont eu – à tort ou à raison – le sentiment d’être mis devant le fait accompli ? Bolkestein avec le plombier polonais, OGM avec le maïs transgénique, la « directive chocolat » avec son débat homérique sur la proportion de matière grasse végétale par rapport au cacaco… A chaque fois, c’est l’Europe qui est la 1ère victime !
Après avoir lancé la coproduction législative avec le Gouvernement en amont des réformes, après avoir entamé la coproduction sociale avec les partenaires sociaux, je souhaite que nous passions à la coproduction européenne. Il faut que les députés soient désormais impliqués le plus tôt possible, sur tout projet important de législation européenne. Nous ne voulons plus transposer des directives sans avoir débattu avec les citoyens et sans avoir donné notre avis en amont des décisions.
Impliquer les parlementaires nationaux, c’est une condition pour remettre le citoyen au cœur de l’Europe ! Nous ne ferons pas tout. Mais nous ferons beaucoup. Parce que nous ne sommes pas des noms sur une liste, élus à la proportionnelle mais des élus de terrain, en contact permanent avec les citoyens, prêts à leur expliquer les enjeux européens et à faire remonter leurs attentes.
Cela passe par un changement de comportements, à l’Assemblée nationale, au Gouvernement et dans les instances européennes. Il faudrait définir un mode d’emploi des « normes européennes » au Parlement français, qui prévoirait la consultation des députés par le Gouvernement en amont des négociations et obligerait à des transpositions rapides…
A l’occasion de la Présidence Française, le Groupe UMP va passer à l’offensive : mise en place d’une cellule de veille en lien avec les eurodéputés UMP pour nous emparer immédiatement « des sujets qui montent » à Bruxelles, invitations des commissaires européens à nos réunions de groupe, cycle de rencontres entre les députés UMP et les principaux interlocuteurs européens… Systématiquement, nous prendrons les devants sur les questions européennes, comme nous l’avons fait en créant le Club des 27, qui rassemble les groupes des parlements nationaux affiliés au Parti Populaire Européen dans tous les parlements de l’Union.
Finalement, même si c’est une épreuve pour l’Europe, le non irlandais ne doit pas nous décourager. Il doit nous inciter à reprendre la cordée pour refonder complètement la relation des citoyens avec l’Europe. C’est vital pour l’avenir de l’Europe et pour l’avenir de la France.
Jean-François Copé
Président du Groupe UMP à l’Assemblée nationale, député de Seine-et-Marne, Président de génération France.fr
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